Déroulement des épreuves de spécialité du bac 2022 : le pire est tout à fait certain…

Les épreuves de spécialité du bac Blanquer se sont déroulées les 11 et 12 mai 2022. Initialement prévues au mois de mars pour que les notes soient intégrées au processus de sélection de Parcoursup, ces épreuves ont été annulées en 2021 (remplacées par du contrôle continu) et décalées en 2022 du fait de l’épidémie de Covid.

Cette première session des épreuves de spécialités confirme en tous points les craintes et les critiques formulées par les organisations syndicales, les associations de parents d’élèves et les associations de professeur·es spécialistes dès l’annonce de la réforme en 2018 : complexité, inégalités, stress, et au final, dévalorisation du baccalauréat comme premier grade universitaire, laissant le champ libre à la sélection généralisée pour l’entrée dans le supérieur.

 

Comment détruire le bac ? En le rendant absurde et aliénant…

Alors qu’un des objectifs affichés de la réforme Blanquer était de simplifier l’organisation du baccalauréat, elle a au contraire créé un chaos qui culmine à la fin de l’année de terminale.

Évalué·es en permanence tout au long de la première et de la terminale, les élèves sont placé·es dans une situation de stress constant. Les épreuves de spécialités comptent pour 32% du baccalauréat : l’enjeu est donc décisif, or l’année n’est pas terminée. Après avoir passé ces épreuves, les élèves doivent continuer à travailler le contrôle continu dont les notes ne s'arrêteront que fin mai. Ils et elles doivent également se mobiliser pour la préparation du Grand oral (10% du bac) car aucune heure n’est dédiée à cette épreuve pendant l’année, tout en étant censé·es terminer les programmes des spécialités (qui ne s'arrêtent pas aux écrits !) - censé·es, car qui le fera réellement ?... Et bien sûr, ils et elles poursuivent aussi la préparation de l’épreuve de philosophie qui se tiendra le 15 juin.

Côté enseignant·es : même stress de continuer à assurer ses cours, d’organiser les épreuves expérimentales du bac qui auront lieu début juin et de préparer les élèves au Grand oral. C’est une surcharge de travail pour les personnels sur cette dernière période de l’année scolaire déjà chargée. Les organisations syndicales sont parvenues à arracher 4 demi-journées libérées de cours pour les examinateurs·trices, mais ces demi-journées sont mises en place localement, à la demande des collègues et sous réserve de la validation des chef·fes d'établissement. De plus ces 4 demi-journées ne sont pas pérennes : aucune parution au BO, donc quid des prochaines sessions ?

Cette première session des épreuves de spécialités confirme la désorganisation au sein des établissements nécessairement induite par la tenue d’épreuves en cours d’année scolaire. De fait, elles perturbent les emplois du temps de l’ensemble des élèves : cours supprimés pour les surveillances, les réunions d’harmonisation et d’entente, et les corrections. Au lieu de la “reconquête du mois de juin”, c’est la perte du mois de mai !

La réforme Blanquer pose ainsi les arguments de la suppression pure et simple des épreuves finales et du passage au contrôle continu complet.

 

Des sujets inégalitaires et problématiques : retour à un examen national !

Les épreuves étant organisées sur 2 jours et toutes les combinaisons de spécialités étant possibles, il existe deux sujets pour chaque spécialité : un sujet jour 1 et un sujet jour 2. De ce fait, dans une même matière, les élèves d'une même classe et d'un même établissement peuvent passer sur des sujets différents. Or, les sujets peuvent être de niveaux très variable entre les deux journées, ce qui a notamment été le cas en humanités-littérature-philosophie (HLP). On savait déjà que c'était un bac local, mais c’est encore pire que prévu !

De plus, des erreurs ont été relevées dans de nombreux sujets, des sujets 2022 ont repris des exercices ou des sujets de la session 2021 (épreuve de maths en Polynésie 2022 : exercice 2 identique à un exercice de métropole de 2021 ; épreuve d'espagnol 2022 : sujet de rattrapage de 2021…), un des sujets de SES a largement fait polémique sur les réseaux. Mais le problème concerne surtout les programmes et le format de l’épreuve que la réforme Blanquer a imposé à cette discipline.

 

Santorin : Comment résister au voyage en enfer ?

On le savait, le nouveau dispositif numérique de correction de copies Santorin c’est la dégradation des conditions de travail, la surveillance des correcteurs·trices et un désastre écologique.

Dans les faits, cela a été de nombreux dysfonctionnements dans la distribution des lots, inaccessibles en SES et en HLP au moment des commissions d’harmonisation du 16 mai : au moment de se réunir pour harmoniser les attentes de correction, les examinateurs·trices ne savaient donc pas quel sujet ils et elles allaient corriger.

Dans leurs convocations, les correcteurs·trices sont invité·es à télécharger leurs copies au format pdf afin de se prémunir d’éventuels bugs de Santorin. Or, en effectuant cette manipulation, plusieurs collègues ont constaté que pour certaines copies, les bandeaux d’anonymat appliqués par le logiciel disparaissaient au format pdf… L’anonymat des copies n’est donc pas garanti par Santorin.

De nouveaux lots de copies peuvent être attribués au fil de l’eau jusqu’au 6 juin. Le travail des correcteurs·trices sera suivi par des coordinateurs·trices (collègues désigné·es par l’inspection) qui pourront les contacter pour leur demander de réajuster leurs moyennes.

Santorin est un outil bien commode pour éviter une nouvelle grève du bac, comme celle qui a lieu en 2019 avec rétention des copies. Mais des solutions sont possibles pour résister au contrôle et aux cadences infernales. Après acceptation de son lot de copies et ouverture de chacune des copies (preuve que l’on remplit notre mission), les correcteurs et correctrices peuvent :
➜ Corriger le plus tard possible ;
➜ Garder 10 copies non corrigées dans leur lot pour éviter d'avoir un lot supplémentaire ;
➜ Corriger hors ligne (par exemple en téléchargeant les copies en pdf - ils et elles y sont invité·es sur leurs convocations) et saisir les notes au dernier moment.