Le 5 décembre 2023, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a présenté au gouvernement son rapport relatif aux “politiques publiques du handicap”. Ce document répond à une demande d’évaluation de ces politiques formulée il y a trois ans par le premier ministre de l’époque, Jean Castex. Il balaie tous les champs sociétaux, dont l’école, dans sa prise en compte du handicap.
L’étude montre que les préjugés et les stéréotypes envers les personnes handicapées restent prégnants dans la société et que l’accès aux droits reste entravé. Les discriminations se fondent non pas sur un rejet des personnes handicapées, mais sur une approche normative qui tend à faire des personnes handicapées des sujets “en souffrance” et/ou “à réadapter” ; dans cette vision, les personnes handicapées ne sont donc pas des sujets de droit, capables d’assurer elles-mêmes leur effectivité, mais des “objets de soins”.
Les rapporteur⋅euses insistent sur les raisons de ce continuum discriminatoire : c’est l’organisation de toutes les composantes et sphères de la société qui doivent changer afin de garantir l’accès aux droits et l’égalité réelle.
Le rapport s’attache à étudier ces différents domaines sociétaux, dont l’école dans son chapitre 2.2. L’essentiel de l’examen se base sur une analyse des données statistiques du ministère -qui montrent une augmentation du nombre d’élèves et d’étudiant⋅es en situation de handicap scolarisé⋅es- tout en nuançant leur pertinence, notamment du fait de multiples angles morts. Dans l’enseignement supérieur, le constat est fait que l’accompagnement des étudiant⋅es en situation de handicap est inégal d’une université à l’autre, en l’absence de cadrage national.
Au-delà de ces données chiffrées, le rapport CNCDH pointe également le manque de formation des personnels, la pénurie de personnels médico-sociaux et de santé dans les écoles et établissements, la non-accessibilité des locaux. Plusieurs recommandations en fin de rapport insistent sur ces trois aspects, bien qu’elles restent trop floues.
Une large part est également consacrée aux personnels accompagnant⋅es des élèves en situation de handicap. La précarité du statut des AESH et l’absence de considération (salaire, reconnaissance, formation) sont présentées comme des entraves importantes à l’accompagnement des élèves. Le rapport analyse de façon intéressante la manière dont le handicap est perçu à l’école à travers la précarité des personnels AESH.
L’organisation du service est également épinglée comme une entrave aux droits des élèves en situation de handicap : comme dans d’autres rapports (celui de la médiatrice de l’Éducation nationale en 2021, de la Défenseure des droits en 2022 ou de la mission sénatoriale en 2023), les Pôles inclusifs d’accompagnement localisés (PIAL) sont présentés comme un frein à l’accompagnement des élèves handicapé⋅es, notamment car ils s’inscrivent dans une logique où les moyens sont répartis “en fonction des besoins du service plutôt qu’en fonction des besoins des enfants”.
La transformation des PIAL en Pôles d’appuis à la scolarité (PAS), prévue par l’article 53 du projet de loi de finances ne va en rien résoudre cette problématique, au contraire. En effet, le ministère prévoit que ce soient les PAS qui déterminent les moyens déployés en volume horaire d’accompagnement ou en matériel.
Les recommandations du rapport, notamment dans le domaine de l’éducation, restent largement en-deçà des enjeux. Pour une école réellement inclusive et qui respecte tous les droits des élèves comme des personnels handicapé⋅es, c’est une politique des moyens qu’il faut revendiquer et arracher.
Pour SUD éducation, il y a urgence à convaincre que tou·tes les élèves ont leur place à l’école et que c’est bien à l’école qu’il revient de garantir des compensations du handicap afin d’en finir avec le validisme et la ségrégation scolaire et sociale.
SUD éducation appelle tous les personnels à se mobiliser pour gagner les moyens d’accueillir tous les élèves à l’école qu’importe leur handicap, leur origine ou leurs difficultés scolaires.
SUD éducation revendique :
-
le respect du droit à la scolarisation pour tou.tes les élèves ;
-
un statut de la Fonction publique pour les AESH avec la reconnaissance d’un temps plein à 24h d’accompagnement, de réelles augmentations de salaires, une formation initiale et continue ambitieuse et de qualité ;
-
la baisse du nombre d’élèves par classe et d’autant plus dans les classes où sont scolarisés des élèves en situation de handicap ;
-
le recrutement de personnels de santé et médico-sociaux dans les écoles et les établissements scolaires ;
-
la formation de tou·tes les personnels sur le temps de service ;
-
l’adaptation du bâti scolaire pour l’école inclusive.