Depuis la loi de 2004, la laïcité a changé de nature : d’un principe qui s’applique à l’État, elle est devenue un instrument coercitif sur des usager·es du service public. En 20 ans, la loi aura finalement imposé plus de devoirs que de droits aux élèves. Et cette dérive ne cesse de s’étendre. Blanquer s’était fait une spécialité des dévoiements islamophobes de la laïcité, déclarant par exemple en octobre 2019 que selon lui “le voile n’est pas souhaitable dans notre société”.
Face à l’islamophobie et au racisme, face aux idées d'extrême droite, soyons solidaires !
Depuis lors, l’islamophobie d’État n’a fait que croître, particulièrement l’année dernière :
Printemps 2023 : la fête de l’Aïd al-Fitr a donné lieu à des situations inacceptables, en particulier la demande de remontée des noms d’élèves absents dans les académies de Toulouse et de Montpellier ;
Juin 2023 : le ministre Ndiaye s’est associé par un communiqué commun au maire de Nice, qui avait instrumentalisé des prières effectuées par des élèves dans des cours d’école ;
Septembre 2023 :le ministre Attal a monté d’un cran dans l’islamophobie d’État en interdisant les abayas à l’école. Cette interdiction est une nouvelle mesure de stigmatisation des jeunes filles musulmanes, dans une logique sexiste, raciste, coloniale et islamophobe.
Dans le 1er degré
Depuis la circulaire Chatel de 2012, la volonté d'interdire aux mères d'élèves portant le voile d'accompagner leurs enfants en sortie scolaire ressurgit régulièrement, comme en 2019 avec la loi Blanquer « pour une École de la confiance » puis en 2021 avec la loi « séparatisme ».
Dans le second degré
Dans les collèges et les lycées, les assistant·es d’éducation se retrouvent en première ligne pour contrôler que les élèves musulmanes ou supposées musulmanes enlèvent bien leurs abayas et robes longues, pour vérifier qu’elles ne mettent pas leur capuche, pour refuser l’entrée à des élèves qui portent le voile ou une tenue supposée religieuse, parfois même pour contrôler la taille des bandeaux des élèves.
Lorsque les AED protestent contre les dérives racistes et islamophobes, en se mettant en grève ou en affichant leur désaccord, ils et elles sont sanctionné·es, licencié·es ou a minima non-renouvelé·es.Les AED ne sont pas la police de l’Éducation nationale. Ils ont un rôle éducatif et non répressif.
D’un autre côté, les AED racisé·es et/ou supposé·es musulman·es subissent également des discriminations à l’embauche et dans l’exercice de leurs fonctions.
Les discriminations islamophobes se multiplient dans l’Éducation nationale, la loi de 2004 devenant un cadre abusif de légitimation de ces violences, jusque dans la formation des futur·es enseignant·es.
Dans l'ESR
Dans l’enseignement supérieur, le port de signes religieux est autorisé pour les usager·es mais cela ne veut pas dire que les personnes qui en portent ne se voient pas discriminées.
Le port du voile par les étudiantes musulmanes est l’un des principaux facteurs de discrimination islamophobe dans l’enseignement supérieur. Ces discriminations peuvent avoir lieu en cours ou en lien avec l'administration; nombreux sont également les cas où une étudiante portant le foulard s’est vue refuser l’accès à la pratique sportive à l'université.
Le rapport d'enquête produit par les Étudiants Musulmans de France établit que les discriminations à caractère racial ou islamophobe ont eu une conséquence directe sur la scolarité de 35% des répondant·es et des répercussions sur le plan psychologique et mental pour 38%.
La dimension sexiste de l'islamophobie
Depuis la rentrée 2023, le port de l’abaya est interdit dans les établissements scolaires, transformant un peu plus les collèges et lycées en lieux de répression et de discrimination sexiste et raciste. Cette interdiction s’inscrit dans la continuité des offensives racistes et islamophobes mises en place, sous-couvert de laïcité, depuis la loi de 2004.
Cette nouvelle restriction ouvre un peu plus la porte à l’intolérance et à l’arbitraire et traduit une suspicion généralisée à l’égard des élèves musulman·es ou perçu·es comme tel·les. Est-ce à l’institution scolaire de décider et de contrôler les tenues des filles et si une tenue est religieuse ou pas ? Un vêtement peut-il être une menace ? Imposer l’interdiction de l’abaya revient à réduire les élèves au silence, à refuser leur apparence, et leur appartenance culturelle. Refuser à des élèves d'assister à des cours à cause de leur tenue constitue une violation de leur droit à l'éducation.
Cette nouvelle mesure engendre des pratiques discriminatoires racistes, mais aussi sexistes. Il faut apprendre aux filles que leur corps leur appartient et que leurs choix vestimentaires ne sont ni des menaces ni des invitations. Cette stigmatisation des filles et plus particulièrement des élèves musulman·es ou supposé·es musulman·es fait le jeu des discours islamophobes. Dans la tradition patriarcale, elle s’ajoute aux nombreuses prescriptions sexistes visant à contrôler le corps et les vêtements des filles et des femmes.
À l’heure où les idées racistes et islamophobes sont largement répandues à travers des médias qui, lorsqu'il ne banalisent pas ouvertement les théories du grand remplacement et de guerre des civilisations, font la propagande raciste et islamophobe du gouvernement, il est important de rappeler nos ambitions d’une école émancipatrice et ouverte à tou·tes sans distinctions de genre, d’origine, de religion et de milieu social.
SUD éducation revendique :
➜ une école publique émancipatrice ouverte à tou·tes sans discrimination aucune,
➜ la fin de l'interdiction des abayas dans les établissement scolaires,
➜ la fin des convocations et des sanctions abusives d’élèves accusé·es d’enfreindre la
laïcité,
➜ la réintégration des personnels mis·es à pied ou licencié·es abusivement pour avoir
protesté contre l'islamophobie dans l’Éducation nationale
➜ la fin du financement de l’école privée par l’État et le transfert des personnels dans le public.