Dans un communiqué rendu public lors d’une conférence de presse qui s’est tenue le 18 juin 2025 à la Ligue des Droits de l’Homme, un collectif de parents de l’Est parisien exige une audience conjointe auprès du Préfet de Police de Paris et de la Rectrice de l’Académie de Paris, au regard du caractère systématique de la répression contre les mobilisations lycéennes. Le collectif indique : “ En tant que citoyen.nes, nous voulons d’abord leur demander des comptes sur ce qui s’est passé [au lycée Hélène Boucher le 6 juin 2024] et des éclaircissements sur leurs responsabilités respectives. Nous voulons par ailleurs obtenir la garantie que ces faits ne se reproduisent pas, ni dans les établissements scolaires ni ailleurs. [...] La répression systématique, policière et judiciaire, des mouvements lycéens doit cesser, qu’elle vise les jeunes en raison de l'endroit où ils et elles vivent, de leurs revendications ou/et de leurs opinions. Les jeunes méritent d'être entendu.es et non réprimé.es.”
D’ici fin juin 2025, une plainte pour violences aggravées sera déposée contre X par une vingtaine d’élèves réprimé.es au lycée Hélène Boucher. Les cinq circonstances aggravantes sont : violences sur mineur.es, en réunion, par des dépositaires de l’autorité publique, sous la menace d’une arme, dans l’enceinte d’un établissement scolaire. Le collectif de parents et la LDH vont également saisir la Défenseure des droits.
Le collectif de parents a souhaité associer SUD éducation Paris à sa démarche en donnant la parole à notre syndicat lors de la conférence de presse.
Pour SUD Éducation Paris les violences policières et institutionnelles qui se sont abattues sur les lycéen.nes parisiennes ces dernières années sont à replacer dans un contexte plus large de répression croissante de la jeunesse (notamment les jeunes des quartiers populaires, les jeunes racisé.es et les jeunes étranger.es) et de criminalisation du mouvement social (les jeunes réprimé.es le sont parce qu’elles et ils sont des militant.es politiques). SUD éducation Paris dresse le constat suivant :
- Depuis le début des années 2000, un processus de criminalisation des jeunes est à l’œuvre et va à l’encontre de la convention internationale des droits de l’enfant comme des principes qui ont prévalu à l’instauration d’une justice des mineur.es en 1945. Ce processus débute avec la loi Perben (2002) qui crée les centres éducatifs fermés pour les enfants de plus de 13 ans, et se poursuit jusqu’à la loi Attal (adoptée en mai 2025, actuellement devant le conseil constitutionnel) qui prévoit la comparution immédiate pour les récidivistes dès 16 ans, la limitation de l'excuse de minorité, la possible assignation à résidence sous surveillance électronique dès 13 ans...
- L'éducation et l'enseignement sont au cœur des politiques sécuritaires et autoritaires des gouvernements successifs. La mise au pas des élèves passe par un processus de militarisation de l’école : Service National Universel entre 2019 et 2025, “classes de défense” depuis 2016 (organisées conjointement par le ministère des Armées et de l'Éducation nationale). Côté personnels, la répression s’est généralisée depuis la loi dite de l’école de la confiance (2019), avec la multiplication des enquêtes administratives et des “mutations dans l’intérêt du service”. Dans ce contexte d’intimidation de la part de l’institution, les collègues sont beaucoup moins nombreux.ses à soutenir les élèves en se positionnant en observateur.ices de leurs mobilisations devant les établissements.
- SUD éducation Paris établit un lien clair entre la violence exercée par les forces de l’ordre contre les lycéen.nes, et la violence exercée depuis bien longtemps sur les mineur.es alterisé.es car issu.es des quartiers populaires, racisé.es, étranger.es et/ou décrétés indésirables. La répression féroce que subissent les Mineur.es Non Accompagné.es en est emblématique (expulsion violente de la Gaîté Lyrique, traques policières…). La violence contre les lycéen.nes des quartiers populaires a éclaté aux yeux de toustes en décembre 2018 lorsque 150 lycéen.nes de Mantes La Jolie sont interpellé.es, agenouillé.es et menotté.es pendant plusieurs heures : “Voilà une classe qui se tient sage !” leur lance un policier. En 2025, les policiers mis en cause obtiennent un non-lieu. La banlieue a toujours été le laboratoire des politiques sécuritaires et liberticides. Laisser faire la répression contre les MNA ou les jeunes de banlieue, c’est laisser la porte ouverte à ce que ces violences s'élargissent, augmentent et finissent par s'exercer sur l’ensemble de la jeunesse.
- SUD éducation Paris dénonce la responsabilité du rectorat de Paris qui incite les chef.fes d’établissement à faire appel aux forces de police lors des mobilisations lycéen.nes, ainsi que la responsabilité des personnels de direction qui décident de le faire. Un net virage répressif a été pris par l’institution depuis une quinzaine d’années, avec l’usage illégitime et le plus souvent illégal de la force policière contre des élèves mineur.es (usage des gaz lacrymogènes, mise en joue avec des LBD, insultes, humiliations, interpellations violentes et gardes à vue sans objet…). C’est la police qui crée la violence sur les blocus.
Pour SUD éducation Paris :
- La police n’a sa place ni dans les établissements scolaires, ni sur les parvis. L’école est un sanctuaire éducatif. Il doit en être de même pour l’université.
- Les élèves doivent disposer d’espaces d’auto-organisation au sein de leurs établissements scolaires, leur permettant de mener entre eux des débats démocratiques, de construire leur esprit critique et d’être ainsi acteurs de leur socialisation politique. Le développement de l’esprit critique et la politisation des jeunes passent par leur auto-organisation.
- Les personnels doivent être aux côtés des élèves dans les luttes pour garantir que leurs droits soient respectés. Nous devons être présent.es sur les blocus, dans les manifestations, devant les commissariats. C’est aussi pourquoi il faut lutter contre la répression qui s’abat sur les collègues au sein de l’éducation nationale.
- Nous devons dénoncer fermement la répression qui s’exerce sur la jeunesse, à l’intérieur et à l’extérieur de l’école, et notamment contre les jeunes des quartiers populaires, racisé.es, étranger.es et résister à leurs côtés.